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JOURNAL DE CAMPAGNE
19 juillet 2007

Corée 2

Avant hier à Roissy, en partance vers Séoul.

J’ai rencontré Mr S.H. Park de la société Hyunday Engenierring Company. Nous ne nous étions pas vus depuis plus d’un an, lors de mon dernier voyage au Pays du Matin Calme. Nous nous sommes d’abord tournés autour, incrédules. Puis nous avons fumé ensemble et sur le mode de la plaisanterie il s’est laissé aller à quelques confidences. Il a quarante ans depuis hier, en paraît dix de plus, brûlé intérieurement par le travail, l’alcool de soju, les cigarettes. Il le sait. Dit que beaucoup de cadres de son âge n’arriveront pas à la retraite, mourront d’épuisement. Voués au cancer, à la cirrhose, au suicide ou à la folie. Il croit aux vertus du travail, à l’avenir de son pays, mais les maudit en même temps. Ils lui ont pris sa vie, celle de ses parents et déjà celle de ses enfants.

Plus tard, dans l’avion, de Paris à Séoul, dans le ronronnement apaisant des réacteurs, abandonné au rêve, livré à l’oubli, errant de fantôme en fantasmes :

Phantoms of the paradise : dans la rue, ces images de femmes idéales sur les présentoirs de magazines, sur les vitrines, partout affichées . Sans odeur de sueur ni peau grasse, aucune ne pue ni ne colle ; parfaites dans leurs poses de rêves. Dans ma mémoire, ces femmes que j’ai étreintes, ces corps baisés avec passion : Elise, fontaine ruisselante, Cristina qui aimait tant se soumettre au désir des hommes, Eva  dont le cul insatiable est aujourd’hui condamné par un cancer du colon, m(s)on amour interdit, Muriel aux yeux magiques, au ventre inondé, Fran, offerte, aimée… et tant d’autres inconnues, au visage parfois à peine entr’aperçu, dans la pénombre de l’arrière-salle d’une boite de nuit, sur un parking d’autoroute, dans un appartement anonyme; de toutes je garde en mémoire le grain de leur peau, le dessin de leur corps, l’expression de leur jouissance ; sur leur visage, dans leur regard, dans les cris de joie sauvage ou les gémissements d’abandon.

Memento gavissus esse. Souviens-toi que tu as joui, et que tu porteras à jamais gravée dans la chair la marque de ta jouissance.

« Au terme d’une longue parade, j’ai pénétré ton corps. À pleine main, j’ai ouvert ton sexe, pétri tes flancs, fait gémir ta bouche, l’ai remplie de mon sexe dressé. Puis j’ai basculé en toi, devenue mer, flot implorant. T’ai longuement possédée, avant que mon cœur, mes entrailles, mon cerveau se vident en toi, t’éclaboussent de diamants blancs. »

Le velours noir du porto, les cigarettes fumées avidement imprègnent ces lignes, libèrent les mots de leur carcan. Et dans le même temps parfois les voue à l’incohérence. Cesser de divaguer. Laisser là ces fragments maladroits, brûler tout ! Au milieu de l’Océan Pacifique, rejoindre la ligne de changement de date qui unit la veille au lendemain. Dormir, dormir enfin. Ce besoin de faire trace, d’écrire ou de peindre, qui force ta fatigue, te pousse à cette table, où prend-il sa source ?

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